[EXCLU] Le laboratoire Pfizer répond à nos questions : "Impossible de modifier notre ADN"

7 janvier 2021 à 18h30 - Modifié : 10 mai 2021 à 11h06 par Sebastien Ruffet

TOP MUSIC
Une course contre la montre a été lancée en 2020 / @Unsplash

Si les politiques peinent à convaincre les Français, alors nous nous sommes dits qu'on allait demander à la source de s'exprimer directement. La laboratoire Pfizer a accepté de répondre - par mail - à toutes nos questions. 

Top Music : A quelle date avez-vous eu connaissance qu'un nouveau virus sévissait et qu'il était potentiellement dangereux pour l'Homme ? Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez fait pour être prêts aussi vite ? A partir de quelle date avez-vous lancé les premières investigations contre la Covid-19 ?

Pfizer : La décision a été prise dès le mois de mars de développer un vaccin avec notre partenaire BioNTech, avec lequel nous travaillons depuis 2018 sur un programme de recherche pour un vaccin contre la grippe. Notre recherche a été mise au défi d’avancer dans un calendrier accéléré, de se montrer créative en termes de solutions. Nous avons rapidement identifié le potentiel d’une technologie innovante, l’ARN messager, développée par BioNtech. 

Avant la pandémie du Covid-19, développer et mettre sur le marché un vaccin en moins d’un an semblait un défi insurmontable. Classiquement, pour le développement d’un vaccin, on procède de manière séquentielle, chaque étape ne démarre qu’après la fin de la précédente. Dans le cas présent, compte tenu de l'urgence, nous avons décidé de lancer plusieurs étapes en même temps. Notre vaccin répond cependant aux mêmes normes de qualité, de sécurité et d’efficacité que les autres vaccins. Accélérer la recherche n’a pas signifié brûler des étapes. Même dans ces circonstances extraordinaires, notre priorité absolue reste la sécurité des patients.

Pouvez-vous ré-exliquer de la manière la plus pédagogique possible ce qu'est l'ARN messager ? Et surtout pourquoi ce n'est pas une thérapie génique...

L’objectif des vaccins traditionnels et des vaccins à ARNm est le même : déclencher une réponse immunitaire pour que l’organisme se mette en ordre de bataille pour combattre le virus et soit capable de le faire de nouveau s’il rencontre le virus. Ce qui change, c’est la méthode pour y parvenir : les vaccins traditionnels contiennent le virus atténué ou inactivé tandis que le vaccin à ARNm donne des instructions aux cellules du corps humain pour produire la protéine spécifique du virus.

Il est impossible de modifier notre ADN en se faisant injecter un vaccin à ARN messager. Il n'y a pas d'interaction entre l’ADN et l'ARN messager injecté. Celui-ci n’est qu’un mode d’emploi permettant à la cellule de fabriquer la protéine qui permettra de reconnaître le virus pour activer le système immunitaire.

C’est vrai que l’on parle soudainement beaucoup d’une technologie dont les Français n’avaient, jusque-là, jamais entendu parler. Pourtant, l’ARN messager est une technologie prometteuse sur laquelle de nombreux laboratoires travaillent depuis plusieurs années. Depuis plus de 10 ans, de nombreuses études ont déjà confirmé son intérêt et son innocuité. C’est une technologie de pointe, qui va certainement être une révolution pour les prochains vaccins à venir. 

La phase 3 laisserait apparaître des faiblesses d'expérimentation sur les personnes de plus de 70 ans ainsi que chez certains allergiques... Quelles certitudes pouvons-nous avoir pour ces publics ? 

Comme pour tout vaccin, trois grandes phases d’études cliniques sont nécessaires à son évaluation par les autorités sanitaires. La toute dernière, que l’on appelle l’étude de phase 3, a été réalisée sur 44 000 personnes dans le monde entier, avec des profils différents, et cette étude a montré que notre vaccin protège 95% des sujets vaccinés contre la COVID-19. Cela veut dire que si on a reçu le vaccin, on a 95% de chances de ne pas développer les symptômes du Covid par rapport à quelqu’un qui n’a pas reçu le vaccin. 

Par ailleurs, l’efficacité du vaccin est constante pour tous les âges, sexes et origines ethniques. L’efficacité observée chez les adultes de plus de 65 ans est supérieure à 94 %. D’autres critères ont été étudiés et sont en cours d’analyse. Ils permettront de mieux préciser l’efficacité pour les différents profils de patients, et de savoir si le vaccin permet de protéger de l’infection par le virus. Il n’y a pas de contre-indication du vaccin pour les personnes allergiques, y compris les personnes allergiques sévères, sauf pour celles qui sont allergiques à l’un des composants du vaccin (lipides biodégradables dont cholestérol, + ARNm, composant de toutes nos cellules).

Dans quels cas le vaccin n'est-il pas recommandé ? 

Le vaccin de Pfizer/BioNTech est indiqué pour l’immunisation chez les personnes âgées de 16 ans et plus. Il n’est pas autorisé pour les personnes de moins de 16 ans et il est contre-indiqué pour les personnes allergiques à l’un des composants du vaccin (cf réponse ci-dessus)

Quid des risques d'effets secondaires de long terme ?

Aucun effet indésirable sévère n’a été observé pour notre vaccin lors de l’essai clinique sur 44 000 participants de profils différents. Nous allons continuer à suivre les participants de l’étude clinique pendant deux ans. Par ailleurs, un plan de surveillance a été mis en place par l’agence européenne du médicament. Nous devons transmettre tous les mois l’ensemble des effets indésirables spécifiques à notre candidat-vaccin. C’est ce que l’on appelle la pharmacovigilance.

Comment expliquez-vous la défiance des Français pour ce vaccin ? 

Il faut dire et redire que la vaccination a le pouvoir de sauver des vies et qu’elle protège l’individu et la collectivité. Pour que nous cassions la dynamique de circulation du virus, une majorité de Français doit se faire vacciner

Ensuite, nous avons réussi à répondre à l’urgence de la situation en développant un vaccin en seulement quelques mois. Mais nos exigences et les exigences des autorités sanitaires, en matière de sécurité, qualité et efficacité sont restées les mêmes. Notre priorité absolue a toujours été, reste et restera toujours la sécurité des patients. On ne joue pas avec la vie des patients. C’est ce message que nous voulons adresser aux Français qui hésitent : se faire vacciner, c’est se protéger et protéger les autres, et ainsi permettre un retour à la vie normale.