La pénurie de maîtres-nageurs met-elle notre été en péril ?

16 mai 2022 à 14h00 par Céline Rinckel

Tous les créneaux horaires ne sont plus assurés dans les piscines alsaciennes
Tous les créneaux horaires ne sont plus assurés dans les piscines alsaciennes
Crédit : Top Music - CR

L’été risque d’être chaud dans les piscines alsaciennes… Mais pas comme vous l’entendez. Il y a une pénurie de maîtres-nageurs qui pourrait entraîner une suppression de certaines activités ou une réduction des heures d’ouverture des piscines. Reportage dans les piscines de Sélestat et Villé.

A la piscine des remparts à Sélestat, sept maîtres-nageurs permettent actuellement de faire fonctionner l’établissement. Ils ne font pas que la surveillance des bassins, ils ont aussi en charge les cours d’aquabike, d’aquagym, de bébés nageurs et surtout l’apprentissage de la natation aux scolaires. Jean-Baptiste Leblond, responsable du service des sports à la Ville de Sélestat, le confirme : « ici les maitres-nageurs touchent à tout. Les activités sont très diversifiées ». Le job semble intéressant et valorisant… Et pourtant il manque des maîtres-nageurs. De moins en moins de jeunes se forment et de nombreux maîtres-nageurs partent à la retraite (de l’époque du « Plan des 1 000 piscines » dans les années 1970).

Il manquerait 5 000 maîtres-nageurs en France

En attendant de pouvoir recruter au moins trois maîtres-nageurs à Sélestat, la piscine a donc fait le choix, depuis septembre 2021, de réduire ses activités dynamiques (aquabike, etc.) et de réduire ses horaires d’ouverture au grand public, au profit des scolaires (surtout les élèves de maternelle et de primaire). Jean-Baptiste Leblond, responsable du service des sports à la Ville de Sélestat, précise également : « par rapport au salaire de base, on a fait un travail pour attirer des maitres-nageurs ». Le salaire, c’est aussi le nerf de la guerre pour Jean-Luc Bianchi, directeur du centre nautique Aquavallées dans la Vallée de Villé. Face à des piscines privées ou des grands parcs aquatiques, le directeur essaye de mettre en avant d’autres avantages : des primes, une mutuelle, une prévoyance et surtout un cadre de travail très agréable.

Au bord du bassin de la piscine Aquavallées. / @Top Music - CR

Le savoir-nager est d’utilité publique

Aquavallées à Bassemberg est une piscine familiale avec tout un tas d’activités (bébé nageur, aquagym, aquabike, aquayoga, un espace bien-être, une école de natation, etc.). Malheureusement Jean-Luc Bianchi a dû lui aussi réduire la voilure. Il n’a plus que trois maîtres-nageurs titulaires et un temps partiel pour faire tourner son centre nautique. « Il nous faudrait six maîtres-nageurs pour proposer toutes les activités et innover. La roue de secours ? C’est le directeur qui vient au bord des bassins », explique-t-il. Depuis le 9 avril 2022, Aquavallées n’est plus ouvert les week-ends, par manque de maîtres-nageurs. « On privilégie les scolaires, c’est d’utilité publique quand on sait qu’il y a eu l’an passé près de 1 000 noyades en France. Les deux ans de Covid ont fait énormément de mal à l’apprentissage de la natation ». Aquavallées a accueilli la semaine passée 700 enfants venus avec leur école. Jean-Luc Bianchi, le directeur de la piscine de la Vallée de Villé, lance donc un appel : « on est centre de formation, on espère avoir au moins un alternant pour le mois de septembre ». Alors si vous cherchez un métier en lien avec le public, valorisant et très diversifié, jetez-vous à l’eau.

C’est un métier super, ça fait plusieurs années que je travaille en piscine. Je suis maître-nageur et maintenant directeur, mais je conserve mes prérogatives de maître-nageur étant donné la pénurie actuellement. C’est un métier où on crée du lien, du lien social avec le public, avec les enfants, on transmet un savoir, on apprend à nager aux enfants, on enseigne : donc c’est des choses que les enfants vont se rappeler toute leur vie. Les scolaires c’est un service d’utilité publique, savoir nager c’est vraiment d’utilité publique, on le voit partout en France, ça permet de réduire le nombre de noyades donc oui, les scolaires c’est vraiment l’activité la plus importante qui doit rester actuellement, même dans cette crise de recherche de maîtres-nageurs on gardera les scolaires jusqu’à l’été.

Jean-Luc Bianchi, directeur du centre nautique Aquavallées dans la Vallée de Vill

Comment devenir maître-nageur ?

Pour devenir maitre-nageur, il faut faire une formation d’un an en alternance, de septembre à fin août, pour obtenir le BPJES - spécialité AAN (Brevet Professionnel de la Jeunesse, de l’Education Populaire et du Sport - spécialité Activités Aquatiques et de la Natation). La formation coûte environ 6 000 euros (certaines aides sont possibles par les collectivités).

Un autre diplôme existe : le BNSSA (Brevet National de Sécurité et de Sauvetage Aquatique) qui est un premier niveau de formation et avec lequel vous ne pourrez faire que de la surveillance de bassins. Souvent les titulaires de BNSSA sont recrutés l’été pour compléter les équipes déjà en place dans les piscines.