Lev Fraenckel, le prof de philo 2.0

Il a quitté la salle de classe mais pas l’envie de transmettre. Après dix ans à enseigner la philosophie dans les lycées alsaciens – dans le public à Bouxwiller puis à Aquiba et ORT à Strasbourg – Lev Fraenckel s’est lancé sur les réseaux sociaux. Pari risqué ? Plutôt pari lucide : “Je voyais bien que je n’arrivais pas à passionner les élèves, c’était frustrant. Alors je me suis dit, pourquoi ne pas essayer autrement ?” 

Sur YouTube, Instagram et TikTok, ses vidéos courtes font mouche. Un ton simple, des références qui parlent aux ados et surtout l’envie de faciliter la compréhension des différents thèmes au programme du baccalauréat. "Trois minutes, ce n’est pas un cours, mais ça peut suffire à montrer à un élève qu’il a déjà des connaissances. Juste avant le bac, ça peut faire la différence", indique-t-il.  

Un “passeur” avant tout  

Mais Lev Fraenckel refuse le costume de "philosophe". "Je ne pense pas avoir encore inventé ma philosophie. Je me vois comme un passeur, quelqu’un qui donne accès au savoir.” Ses vidéos, ses cours, ses livres - le dernier en date, Ma vie a-t-elle un sens ? publié début mai - cherchent à outiller les jeunes pour comprendre le monde et eux-mêmes. Une sorte de boîte à outils pour penser. 

Et ses outils ne ressemblent pas à ceux du prof traditionnel. Oubliez Kant et Voltaire : chez lui, la série Westworld voisine avec Spinoza et Vald rencontre Baudelaire. Il assume ce mélange. "Quand Vald parle de la mort de sa mère dans Paradis perdu, je peux lier ça à Freud et au concept de plénitude intra-utérine. C’est le paradis perdu de notre enfance. Il faut partir de là où sont les élèves et pas leur reprocher de ne pas lire les classiques." 

De la philosophie du quotidien  

Lui-même consomme les séries, les films, les musiques dont il parle. "J’ai toujours un carnet avec moi, je note les idées qui me viennent." Sa pédagogie naît de ce quotidien partagé avec ses élèves, et d’un vrai souci de transmission : "Ce n’est pas difficile de m’adapter aux jeunes, vu qu’on regarde la même chose."   

Et si philosopher, au fond, c’était toujours cela : faire le lien entre l’ancien et le récent ? "Les grands philosophes sont intemporels. Lire Platon ou Thomas d’Aquin, c’est encore stimulant aujourd’hui. À condition de créer des ponts, pas des barrières." C’est cette conviction qu’il transmet à travers ses contenus : un pont tendu entre les générations. 

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Ses conseils avant le bac 

À presque un mois jour pour jour du bac de philosophie pour les élèves de Terminale – le 16 juin de 8h à 12h pour les filières générales et technologiques – le “serial thinker” a trois conseils à vous donner :  

1. Faire des fiches sur chaque notion avec les auteurs et exemples principaux. "5 % d’efforts bien ciblés peut produire 95 % du résultat." 

2. Maîtriser la méthode de la dissert’ et de l’explication de texte. "Il faut savoir construire un plan, problématiser, structurer." 

3. Prendre du plaisir. Lire, écouter, regarder des vidéos de philo : "C’est comme ça qu’on retient, pas en récitant." 

Le piège à éviter ? Le catalogue de citations. "Une citation sans explication, ça ne vaut rien. Il faut montrer en quoi elle éclaire le sujet." Et si on est paralysé le jour J ? "Si tu sèches, mieux vaut aller vers l’explication de texte. Et pour la dissert’, choisis le sujet sur lequel tu as le plus de choses à dire, pas celui qui t’émeut le plus." 

Rendre la philo vivante, accessible et actuelle : voilà la mission que s’est donnée Lev Fraenckel pour que chacun à sa manière, puisse se sentir un peu philosophe.