Mohamed Siaaliti, restaurateur : "Il y a d'autres solutions"

4 février 2021 à 12h56 - Modifié : 10 mai 2021 à 11h09 par Rédaction

TOP MUSIC
Mohamed Siaaliti, gérant du Dubliners, dans son nouveau pub l'Ambassade. /@Top Music

Mohamed Siaaliti, l'ex-candidat de Koh-Lanta mais aussi le gérant du restaurant/bar le Dubliners à Strasbourg, évoque les difficultés à tenir le coup en cette période de crise sanitaire.

Mohamed Siaaliti, 40 ans, est le gérant de l'institution à Strasbourg : le Dubliners. Il a investi dans une autre brasserie/bar à la suite du premier confinement, l'Ambassade, qui ouvrira ses portes dès qu'il le pourra. Avec ses associés, ils font de la vente à emporter et de la livraison comme tous les restaurateurs. La concurrence est rude, mais cela  permet tout de même de garder un contact avec leur clientèle. Mohamed garde espoir que des solutions vont être apportées et que tout va s'améliorer.

"Ce sont 20 années de travail qui peuvent partir en fumée en quelques mois"

Mohamed Siaaliti est de nature à ne pas baisser les bras, à ne rien lâcher, mais il évoque combien c'est difficile et que le pire dans tout cela, c'est le manque de visibilité : "Ce qui est surtout illogique c'est qu'on fait de la vente à emporter et qu'on n'a pas le droit d'avoir du monde devant l'établissement. Tandis que si vous allez devant les enseignes de vêtements, comme par exemple Primark, il y a 150 personnes qui font la queue et ça ne dérange personne. Nous les petits artisans, les petits commerçants, on est montré du doigt et on est un peu les boucs émissaires de cette pandémie. On a bien prouvé aujourd'hui qu'on est fermé depuis des mois, et les cas ne diminuent pas, au contraire ils augmentent. Il faut chercher la vérité ailleurs. Ce n'est pas nous qui sommes vecteurs de favoriser la transmission du virus."

"Il faut savoir qu'un restaurant à la base, au niveau de l'hygiène, c'est déjà très réglementé. On est suivi et on est contrôlé. Je pense que s'il y a bien un établissement au niveau de l'hygiène qui respecte les règles, c'est le restaurant. Et c'est là aujourd'hui, où l'État doit assumer pleinement son rôle, on n'est pas responsable de ce qu'il s'est passé, on subit et c'est tout. On parle des restaurants car c'est un secteur très touché mais on n'est pas les seuls, il y a les salles de sport, les cinémas et tout le milieu artistique qui souffrent. On n'est pas les seuls, mais derrière les restaurants, il y a beaucoup de gens qui galèrent. On oublie souvent les viticulteurs, les brasseurs ou les producteurs de fruits et légumes, c'est toute une filière qui souffre derrière."

"Mais ce qui est dramatique aujourd'hui, c'est que pour les Travailleurs Non-Salariés (TNS), on n'a pas droit au chômage. On crée de la richesse, on crée de l'emploi, on paye des charges, on paye des impôts et aujourd'hui dans cette période-là on n'a pas de salaires, on ne touche pas le chômage. Nos salariés sont mieux lotis que nous, chefs d'entreprises. On a zéro revenu, c'est-à-dire que si on ne fait pas de la vente à emporter ou si on ne se débrouille pas comme on peut, aujourd'hui on ne peut pas vivre. L'UMIH (Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie) a fait un gros boulot par rapport à ça, aujourd'hui j'ai 17 salariés qui sont au chômage partiel au Dubliners, et sur ces 17 salariés-là, on paye des congés tous les mois et c'est honteux. Les gens sont à la maison, ils ont leur salaire quasiment à 100%, mais aujourd'hui on paye deux jours et demi de congés payés par mois par salariés. C'est à l'État de prendre en charge ces congés payés et pas à nous qui sommes fermés depuis des mois."

"Il y a de meilleures solutions"

Mohamed Siaaliti continue de s'accrocher, avec le sourire aux lèvres : "J'ai vu les appels à ouvrir de quelques-uns de mes confrères dans quelques régions de France, notamment dans le Doubs et aussi à Nice. J'avais fait une petite vidéo coup de gueule il y a quelques temps sur les réseaux, où je disais que je n'allais pas ouvrir. Ce n'est pas parce que j'ai peur, mais aujourd'hui on risque gros si on ouvre. On risque de perdre toutes nos aides, dont le chômage partiel et donc de mettre une dizaine ou une quinzaine de salariés sur le carreau."

Mohamed Siaaliti avait posté sur ses réseaux sociaux plusieurs vidéos de ses réactions suite aux annonces des mesures du gouvernement : https://www.facebook.com/100000384647090/videos/3612134142142705/

"La meilleure des solutions est qu'on aurait pu penser à ouvrir uniquement en terrasse. On sait aujourd'hui que le virus circule uniquement à l'intérieur. Mais en terrasse, on aurait pu espacer nos tables et même si on avait que 30% de la capacité d'accueil ça nous aurait quand même permis de tenir un peu le cap sur cet hiver. À présent, c'est compliqué parce qu'on est fermé depuis fin octobre, avec une première fermeture au printemps dernier, donc là ça fait quasiment sept à huit mois de fermeture sur une année."

"Ce n'est pas comparable, Koh-Lanta c'est dur, physiquement et mentalement. Mais dans Koh-Lanta on a une visibilité, on sait que ça dure 40 jours, on sait que c'est compliqué mais on sait qu'on peut apercevoir le bout du tunnel si on tient le coup. En revanche, là on n'a aucune visibilité, pas de perspective d'avenir, on n'a rien et c'est ce qui est le plus compliqué aujourd'hui moralement. On n'arrive pas à se projeter, on ne sait pas de quoi demain sera fait. Aujourd'hui, c'est 15 à 20 ans de travail qui peuvent partir en fumée sur quelques mois."